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Pobes, un milan royal équipé d’une balise Argos/GPS en Espagne, a été retrouvé mort empoisonné à Heiteren (68), après un voyage de près de deux milles kilomètres. Non seulement cette fin dramatique clôt l’étude menée sur l’oiseau, mais surtout elle confirme les menaces qui pèsent sur l’espèce, désormais classée en danger d’extinction.

 

 

 

 

Pobes, marqué en Espagne sur son site d'hivernage - Photo Javier de la PuentePobes, marqué en Espagne sur son site d'hivernage - Photo Javier de la Puente

C’est en février 2014 que le rapace, un individu adulte, avait été capturé à Larrabe (Pyrénées espagnoles), durant son hivernage, et équipe par des ornithologues de la SEO* (Sociedad Española de Ornithologia). Un mois plus tard, l’oiseau démarrait sa migration pré-nuptiale à la recherche d’un territoire adéquat pour sa saison de reproduction. Après avoir passé les cols pyrénéens, il a traversé toute la France, direction le Luxembourg ; à la hauteur de Cologne, en Allemagne, il a viré au Sud.

 

En avril, le signal faiblit puis cessa. Contactée par la SEO via Adrian Abischer, spécialiste européen de l'espèce, la LPO Alsace réussit à localiser l’oiseau, grâce aux ultimes données collectées ; celui-ci fut trouvé mort, à Heiteren (68), à côté d’un cadavre de renard, et présentait des signes évidents d’empoisonnement.

 

Les résultats de l’autopsie ainsi que les analyses toxicologiques confirment cette thèse, puisque ces analyses ont révélé des traces de Carbofuran, un puissant insecticide. Interdit à la commercialisation partout en Europe en raison de sa toxicité, il reste hélas utilisé, de manière illégale, aussi bien en France que dans la Péninsule ibérique, justement pour empoisonner des animaux. Dans le cas qui nous concerne, il est évident que le renard a été placé pour servir d’appât et tuer des espèces charognardes. L’usage de tels appâts empoisonnés est particulièrement nocif, puisqu'ils sont non sélectifs, et affecte de nombreuses espèces qui n’étaient pas visées, y compris les espèces protégées et domestiques.

 

Le même individu au laboratoire d'analyse - Photo Christine Manson, au Laboratoire vétérinaire départemental du Haut-RhinLe même individu au laboratoire d'analyse - Photo Christine Manson, au Laboratoire vétérinaire départemental du Haut-RhinCet épisode lamentable confirme la thèse que l’empoisonnement est une des causes du déclin des populations de milans royaux ; l'espèce est désormais classée « en danger d’extinction », sur les listes rouge des oiseaux nicheurs, à la fois en Alsace et en Espagne, avec une diminution de 40% des effectifs entre 1994 et 2004.

 

Rappelons que les individus trouvés morts empoisonnés ne représentent que la partie émergée de l’iceberg, puisqu’on estime que seuls 7 à 10% des oiseaux sont retrouvés. Dans le cas de Heiteren, c’est la balise Argos/GPS qui a permis de localiser l’animal. En Espagne, les scientifiques estiment à 45 000 le nombre de milans royaux qui seraient morts d’empoisonnement sur une période de 5 ans. Si on ajoute le fait que ce sont les oiseaux adultes reproducteurs qui sont touchés, l’impact est encore plus désastreux, puisque ce sont autant d’individus qui ne pourront plus se reproduire.

 

* Balise financée par le gouvernement du Pays Basque Espagnol, dans le cadre d'un projet de suivi migratoire global, appelé "Migra", financé par la Fundation Iberdrola.

 

En savoir plus sur le milan royal

 

Cliquer sur l'image pour accéder au site de la SEO

Route migratoire de Pobes, suivi dans le cadre du programme MigraRoute migratoire de Pobes, suivi dans le cadre du programme Migra

 

En médaillon : cadavre du milan - Photo LPO Alsace