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Tués au fusil, piégés dans des filets ou avec de la glu, 25 millions d’oiseaux sont victimes chaque année de braconniers dans les pays du pourtour méditerranéen. C’est ce que montre le premier rapport scientifique complet publié sur cette question par BirdLife. L’impact de la chasse sur les populations d’oiseaux est ainsi plus élevé que ce que l’on imaginait jusque là. BirdLife veut renforcer son action contre les massacres d’oiseaux dans les prochaines années.

 

Pour les oiseaux migrateurs, le pays le plus dangereux est l’Egypte : dans ce seul pays, environ 5,7 millions d’oiseaux sont tués chaque année. L’Italie n’est pas loin : environ 5,6 millions de victimes sont à déplorer chez notre voisin. Pourtant l’Italie, membre de l’Union européenne, est censée respecter les directives strictes protégeant les oiseaux, édictées par l’UE. D’autres pays comme la Syrie, le Liban, Chypre, la Grèce et la France, sont aussi désignés par le rapport comme problématiques.

 

Loriot d'Europe pris dans les filets - Photo RSPBLoriot d'Europe pris dans les filets - Photo RSPB

Le rapport ne se contente pas de montrer le nombre total d’oiseaux illégalement tués dans chaque pays, mais fournit également des précisions sur le nombre d’oiseaux tués par kilomètre carré et par habitant du pays concerné. En terme de nombre d’oiseaux tués par habitant, Chypre est le « vainqueur » absolu : sur cette île méditerranéenne située sur la route de nombreux migrateurs, 196 oiseaux sont tués pour 100 habitants chaque année. Si l’on examine la surface, c’est Malte qui arrive en tête : la pression du braconnage est ici énorme : 341 victimes par km2.

 

Les raisons de piéger ou tirer des oiseaux sont multiples et différentes d’une région à l’autre. La première cause est d’utiliser les oiseaux comme ressource alimentaire directe, ou indirecte (exemple : vente de passereaux à des restaurants à Chypre). Le tir comme « activité sportive » ou « hobby » est cependant aussi très développé. La troisième cause est liée au commerce des petits passereaux, piégés pour être utilisés comme oiseaux d’ornement.

Une cause importante de raréfaction des espèces

Rougegorge familier collé à de la glu - Photo RSPBRougegorge familier collé à de la glu - Photo RSPBLe rapport BirdLife précise quelles sont les espèces les plus impactées par le phénomène. Le pinson des arbres est en tête (2.9 millions d’oiseaux tués par an), suivi par la fauvette à tête noire (1,8 mo.), la caille des blés (1,6 mo.) et la grive musicienne (1,2 mo.). La chasse illégale a une telle ampleur qu’elle est, après la disparition des milieux naturels, la cause majeure du déclin de certaines espèces en Europe. 40 espèces d’oiseaux migrateurs qui traversent la région méditerranéenne ont décliné fortement ces dernières décennies. Le cas de la tourterelle des bois est frappant : cet oiseau a vu ses effectifs européens diminuer de 30% durant les quinze dernières années. Plus d’un million de tourterelles continuent d’être tuées chaque année.

 

Patricia Zurita, directrice générale de BirdLife International, est convaincue de la nécessité d’agir pour assurer aux oiseaux migrateurs des zones de sécurité lors de leurs migrations saisonnières. Des efforts importants doivent être menés pour réduire la chasse illégale en Méditerranée. Sans cela, les efforts pour protéger l’avifaune et les habitats dans les zones de reproduction pourraient être vains.

 

Les partenaires BirdLife sont engagés depuis plusieurs années contre le braconnage, par exemple à Malte, à Chypre, en Italie ou en France. Le travail est toutefois difficile, souvent décourageant et même parfois dangereux pour les protecteurs des oiseaux. De nombreux pays rechignent à appliquer les lois protégeant l’avifaune ; les actions de police ne sont souvent pas suivies de condamnations. Enfin, les mentalités sont très difficiles à faire évoluer dans ces régions.

 

Egypte : 5,7 millions d’oiseaux en moyenne par an (de 0,7 à 10,6 millions). Les cailles des blés sont les premières victimes des filets posés. Les loriots d’Europe, les pie-grièches écorcheurs, les foulques macroule payent également un lourd tribut.

Italie : 5,6 millions d’oiseaux en moyenne par an (de 3,4 à 7,8 millions). Près de la moitié des 348 espèces d’oiseaux italiennes est visée. Les plus chassés : pinsons des arbres, grives musiciennes, pipits farlouses.

Syrie : 3,9 millions d’oiseaux en moyenne par an (de 2,9 à 4,9 millions). La chasse se poursuit malgré la guerre civile. Les oiseaux les plus touchés sont les fauvettes à tête noire et grisette, les alouettes des champs ainsi que les rapaces.
Liban  : 2,6 millions d’oiseaux en moyenne par an (de 1,7 à 3,5 millions). On y tire toutes espèces d’oiseaux sauvages. 60% des 327 espèces présentes sont touchés. Parmi les cibles favorites : la caille des blés, la fauvette à tête noire et l’alouette calandre.
Chypre : 2,3 millions d’oiseaux en moyenne par an (de 1,3 à 3,2 millions). L’interdiction de capture en vigueur depuis 1974 n’est pas respectée. Les grives musiciennes, les pouillots véloces, les fauvettes à tête noire ainsi que les fauvettes babillardes figurent toujours au menu.
France : 522 000 oiseaux en moyenne par an (de 149 000 à 895 000). Plus de 100 espèces sont visées par les braconniers. Les pinsons des arbres, les bruants ortolans ainsi que les rougegorges meurent ainsi par milliers.

 

 

Communiqué de l'ASPO/BirdLife Suisse du 20 août 2015