Imprimer

Le centre de soins LPO de Rosenwiller a recueilli, depuis son ouverture en mai 2010, près de 90 espèces d’oiseaux différentes. Depuis le 1er juin, il a en soin 5 oisillons d’une espèce parmi les plus rares d’Alsace : la chevêchette d’Europe.

 

 

 

 

Parmi les espèces recueillies, nombreuses sont bien sûr les espèces que l’on trouve dans les jardins ou à proximité des zones urbanisées. Non seulement ces espèces sont celles qui souffrent le plus des activités et des infrastructures humaines (collisions contre les véhicules et les vitres, prédation par les chats, destructions volontaires des nids…) mais ce sont aussi celles qu’il est facile de repérer quand elles sont en détresse. Merles noirs, mésanges, hirondelles, martinets noirs, buses variables, faucons crécerelles… font ainsi partie des espèces les plus communes accueillies au centre. Rares sont parmi les pensionnaires les espèces plus discrètes ou vivant loin de la présence des hommes, au cœur des forêts ou dans les zones humides par exemple, même si leurs populations se portent bien (pic noirs, milans noirs, pipits…).

 

Il est de fait exceptionnel que des oiseaux appartenant à une espèce à la fois très discrète mais aussi très rare, et qui plus est en détresse, soient repérés et transférés au centre de soins.

C’est pourtant le cas de ces 5 oisillons de chevêchette d’Europe. Cette chouette, la plus petite d’Europe parmi les 8 espèces de rapaces nocturnes qui nichent en Alsace, est aussi la plus rare (avec sa cousine la chouette de Tengmalm). Sur l’ensemble du massif vosgien, seuls quelques dizaines de couples sont inventoriés chaque année et une dizaine de nids au plus sont découverts.

 

Repérer des chevêchettes suppose d’identifier d’abord son cri, au début de la saison de reproduction, puis de localiser la cavité dans laquelle elles nichent, dans un vieil arbre au cœur des forêts les mieux préservées.

Un des oisillons recueillis au centre de soins - Photo Yves MullerUn des oisillons recueillis au centre de soins - Photo Yves MullerC’est ce qu’a fait Grégory Haas, membre de la LPO en Lorraine, qui a repéré un couple dans le massif vosgien près de Saint-Dié. Fasciné par cette minuscule chouette (elle mesure environ 15 cm de haut, la taille d’un étourneau !), il s’est ensuite rendu quotidiennement sur place pour observer et suivre l’évolution de la nichée. Une nichée qui se portait à merveille, jusqu’au jour où les parents ne se sont plus montrés… Qu’est-il arrivé aux adultes ? Nul ne le saura jamais… Au 2e jour d’absence des parents, sachant que des oisillons ne peuvent survivre longtemps sans être nourris, il a pris l’initiative de tout faire pour sauver ces petits livrés à eux-mêmes. Il a ainsi réussi à atteindre la cavité, à extraire les 5 oisillons, déjà affaiblis, et à les apporter au centre de la LPO Alsace, à Rosenwiller.

Les 5 oisillons sont aujourd’hui en parfaite santé et pourront bientôt être relâchés sur leur site de découverte.

La LPO Alsace se réjouit bien évidemment de la fin heureuse de cette aventure pour une espèce aussi emblématique et d’avoir pu sauver cette nichée au-delà des frontières administratives…

 

En savoir plus sur la chevêchette d’Europe (Glaucidium passerinum)

(cliquer sur suivant)

 


 

Une chevêchette adulte dans son milieu naturel - Photo Yves MullerUne chevêchette adulte dans son milieu naturel - Photo Yves MullerLa plus petite chouette d'Europe est une espèce généralement sédentaire, communément habitante des forêts de conifères de la zone boréale, et représentée dans les forêts mixtes de haute montagne. Les sites de nidification sont souvent entourés de zones humides, avec des sources et des bosquets d'épicéas à proximité. Ces sites sont normalement des cavités creusées par des pics, dans les conifères en général, mais aussi les bouleaux, les hêtres et les chênes. Elle est active à l'aube et au crépuscule mais aussi pendant la journée. Contrairement aux autres rapaces nocturnes, sa vue est en effet mauvaise dans l'obscurité complète.

 

La ponte a lieu d'avril à juin. Le nombre d'œufs varie de 3 à 7. L'incubation, assurée par la femelle, dure presque un mois. Les petits, qui prennent leur envol après 1 mois environ, sont encore nourris par les parents pendant deux à quatre semaines avant d'être réellement indépendants.

 

La chevêchette d'Europe se nourrit principalement de petits oiseaux, mésanges, fauvettes, gobe-mouches, roitelets... Mais elle peut également chasser des oiseaux de taille égale, voire supérieure, à la sienne, en s’attaquant par exemple à des pics, des grives musiciennes ou des becs-croisés. Elle apprécie aussi les petits mammifères, campagnols, mulots et musaraignes. Occasionnellement, de petits lézards et des chauve-souris, des poissons et des insectes peuvent faire l'affaire. A la fin de la saison de reproduction, elle constitue des réserves de nourriture qu'elle cache dans des cavités naturelles pour les périodes trop enneigées pour chasser.

 

La synthèse des données collectées au cours de la période 2000 à 2009 a permis d’inventorier 72 territoires distincts occupés par l’espèce l’une ou l’autre de ces années : 33 dans les Vosges du Nord, 5 dans les Vosges moyennes et 34 dans les Hautes-Vosges. A partir de ces données, la population de chevêchette a été estimée entre 60 et 120 couples au début du XXIe siècle pour l’ensemble du massif vosgien (Y. Muller, Ciconia 35 (3), 2011, pp. 97-110.).

 

L’espèce ne paraît pas menacée à court terme mais la modification des habitats forestiers en raison des nouvelles pratiques sylvicoles et la diminution des populations des proies sont des menaces à plus long terme pour la survie de l’espèce dans le massif vosgien.