Un pêcheur exceptionnel

Signes distinctifs

Une espèce uniquement piscivore - Photo Axel SchmidtUne espèce uniquement piscivore - Photo Axel SchmidtDe longues ailes (jusqu'à 1,70 mètre d'envergure), de puissantes serres acérées et des yeux jaune vif perçants, telles sont les caractéristiques des balbuzards pêcheurs, qui font partie des grands rapaces diurnes de notre région. Leur plumage est contrasté : on les reconnaît ainsi grâce à leur ventre blanc, leur bande pectorale sombre (plus réduite chez le mâle) et le bandeau oculaire bien marqué s’étendant jusqu’à la nuque.

Une technique de pêche impressionnante

Le balbuzard est un pêcheur particulièrement habile. Avec un poids de 2 kg maximum, il plonge dans l'eau, toutes serres dehors, depuis des hauteurs parfois considérables. Il peut capturer des poissons jusqu'à un mètre de profondeur.

Si la tentative de pêche est couronnée de succès, l’oiseau s'élève à nouveau dans les airs en battant vigoureusement des ailes, avec sa proie dans les serres.

Mais il arrive parfois que le poisson saisi soit trop gros et lourd, que l'oiseau ne puisse plus lâcher prise et qu'il soit alors entraîné dans les profondeurs et se noie.

Reproduction et migration

Un nicheur arboricole

C’est tout au sommet des arbres que l’on trouve les nids des balbuzards pêcheurs. Ces arbres doivent surplomber la forêt ou être isolés pour offrir une vue et un accès dégagés mais aussi disposer de branches sommitales suffisamment solides pour pouvoir accueillir leur nid volumineux. Les balbuzards s’installent aussi parfois sur des pylônes électriques, qui leur offrent ces mêmes conditions.

Le nid est construit par les deux partenaires et est confectionné avec du branchage sec et une litière moelleuse. Ils sont utilisés pendant de nombreuses années et sont constamment consolidés pendant l'élevage des jeunes. En raison de leur poids important et de leur position exposée, ils peuvent chuter durant les tempêtes.

Elevage des jeunes

Ici deux adultes et un petit - Photo Denis DujardinIci deux adultes et un petit - Photo Denis DujardinLa ponte, composée en moyenne de 3 Å“ufs, commence généralement mi- avril ; dès leur naissance 40 jours plus tard, les jeunes balbuzards sont abondamment nourris avec du poisson. Pendant cette période, ils sont vulnérables à la prédation (rapaces, corvidés, martre), qui reste toutefois occasionnelle. Ils prennent leur envol durant la deuxième quinzaine de juillet.

Migration

A la fin de l'été, adultes et jeunes quittent à tour de rôle la zone de reproduction et se mettent en route pour l'Afrique, où ils passeront l’hiver. Philopatriques, les jeunes retourneront, à leur maturité sexuelle (à l’âge de 3 ans), nicher dans la proximité immédiate de l’aire qui les a vu naître, et forment ainsi des colonies lâches. Les balbuzards peuvent vivre longtemps : jusqu’à au moins 24 ans !

Distribution et menaces

Quasi cosmopolite, le balbuzard pêcheur se reproduit sur presque tous les continents. En France et en Allemagne, il est un nicheur rare. Ce ne fut pas toujours le cas, mais la persécution dont il a été victime à partir du Moyen-Âge, puis l’aménagement des rivières, l’exploitation des forêts alluviales et l’utilisation de pesticides ont contribué à sa quasi extinction. Il est heureusement strictement protégé depuis 1972 et est inscrit à l'annexe I de la directive européenne sur la protection des à compléter. En France, ses principaux fiefs actuels sont la région Centre et la Corse. En Allemagne, sa présence se concentre dans les paysages lacustres du nord-est de l'Allemagne.

Une migration longue et parsemée de dangers

Les balbuzards de la région du Rhin supérieur migrent vers l’Afrique de l’Ouest via l'Espagne et la Méditerranée occidentale puis le long de la côte nord-africaine.

Comme toutes les espèces migratrices, les balbuzards pêcheurs sont confrontés à de nombreux dangers sur leur route vers leurs quartiers d'hiver africains, où l’offre alimentaire peut être pauvre (pollution des eaux, utilisation massive de pesticides, surpêche…) et le braconnage intensément pratiqué.

Un retour inespéré

Dans les forêts alluviales du Rhin supérieur, les derniers balbuzards nicheurs ont été observés en 1902. Ce n’est qu’en 2019, soit près de 118 ans plus tard, qu’un couple a de nouveau réussi sa saison de reproduction !

Wanted : un endroit pour nicher

La reproduction du balbuzard pêcheur est limitée en premier lieu par la disponibilité en sites de nidification appropriés, un élément rare dans nos forêts exploitées. Il est donc bienvenu de leur apporter un coup de pouce en garantissant la présence de tels sites. Les jeunes de retour sur leur site de naissance préfèrent s’installer sur des anciens nids inoccupés. Des individus de passage peuvent aussi être attirés par des sites où des congénères et des nids sont présents. La pose de plateformes artificielles de nidification est ainsi un moyen efficace pour aider une population à se reformer.

 

 Installation d'une plateforme artificielle par un grimpeur - photo NABUInstallation d'une plateforme artificielle par un grimpeur - photo NABU Silhouette idéale d'un arbre approprié. Ici avec une plateforme artificielle (photo NABU)Silhouette idéale d'un arbre approprié. Ici avec une plateforme artificielle (photo NABU) 

Un projet transfrontalier de protection

Une individu en vol - Photo Jean-Marc BronnerUne individu en vol - Photo Jean-Marc BronnerLes oiseaux ne connaissant pas de frontière, le NABU Südbaden et la LPO Alsace ont profité du retour du balbuzard pêcheur le long du Rhin pour développer ce noyau de population. Ils ont associé leurs compétences dans le cadre d’un programme transfrontalier soutenu à 50% par l’Union Européenne. A partir de l’année 2021, les deux associations ont recherché, avec un réseau de bénévoles, les meilleurs arbres de part et d’autre du Rhin ; ils les équipent progressivement de plateformes artificielles de nidification et mènent une campagne de sensibilisation auprès des scolaires et de la population riveraine.

Un projet qui devrait permettre à l’espèce de faire à nouveau partie intégrante de la nature dans le Rhin supérieur.