Contexte général
L’ouette d’Egypte est un anatidé originaire de l'Afrique subsaharienne, de la vallée du Nil et du sud de la Palestine ; elle a été introduite en Angleterre dès le XVIIIème siècle. Les premières nidifications en liberté, d’individus échappés de parcs, ont eu lieu aux Pays-Bas en 1967, puis en Belgique en 1982, en Allemagne en 1985 et en France la même année (cas de nidification probable dès 1983 en Alsace).
Au début des années 2000, la population européenne était estimée entre 8000 et 9000 couples : 1000 en Angleterre, 5000 aux Pays-Bas, 1000 en Belgique et entre 1000 et 1500 en Allemagne. Les effectifs de la France restaient très faibles avec à peine 23 couples nicheurs répertoriés en 2006, principalement dans le quart Nord-Est du pays (enquête LPO France). Une nouvelle enquête de la LPO, menée en 2011, permettra d’actualiser ce chiffre.
![]() | ![]() |
La situation en Alsace
L’origine exacte de l’installation de l’espèce en Alsace reste inconnue, même si l’hypothèse la plus vraisemblable est celle d’une colonisation spontanée à partir des populations allemandes au début des années 70.
Les effectifs de l’espèce ont évolué de la façon suivante en Alsace :
- mise à part l’une ou l’autre donnée du XIXème siècle, la première mention des temps historiques date du 13 avril 1971 à Kembs, dans le Haut-Rhin ;
- s’en suit une progression lente, mais régulière : 3 individus en 1982, 7 en 1992, une 30aine en 2002, etc. ;
- le premier groupe d’une taille importante (33 individus) est signalé en 2001, dans le nord du Bas-Rhin ;
- la population alsacienne ne cessera ensuite d’augmenter : en 2006, elle atteint 70 à 100 individus, puis 450 à 650 individus en 2011, avec des groupes excédant localement 100 individus.
Le nombre de couples nicheurs a également régulièrement augmenté :
- 1983 : 1 couple nicheur probable (construction d’un nid par un adulte dans un arbre fruitier le 9 avril à Largitzen dans le Sundgau ; Burglin, 1983 [*]) ; 1992 et 1995 : nidification d’un couple lâché volontairement dans une gravière à Rumersheim (B. Régisser, fichier LPO Alsace)
- Ă partir de 2001 : cas annuels
- 2006 : 5 couples recensés
- 2011 : au moins 50 couples et probablement entre 60 et 100 couples. L’amplitude de cette fourchette est due à la plasticité de l’espèce dans le choix de ses biotopes de nidification (elle peut se contenter de petites pièces d’eau) qui la rend difficile à recenser de façon exhaustive.
![]() | ![]() |
Des habitudes peu compatibles avec la faune indigène
L’ouette d’Egypte est l’espèce exotique qui a la plus forte dynamique expansive en Alsace, due notamment à sa prolificité et à une période de reproduction étalée sur pratiquement toute l’année, y compris l’hiver.
Les nids, de grande taille, peuvent être situés dans les arbres - Photo Jean-Marc BronnerLa nidification a lieu au sol ou dans les arbres (grosses cavités ou nids d’autres espèces, sur des arbres en chandelle ou entiers). Le couple peut aussi s’installer sur des potences équipées de nids, voire sur des pylônes. Les nids utilisés sont ceux de la cigogne blanche, du milan noir ou de la corneille noire, au besoin en évinçant d’abord les occupants.
L’agressivité de l’espèce en période de reproduction peut poser problème vis à vis de l’avifaune indigène, que ce soit lors du choix des nids ou lors de la défense du territoire. Dans ce cas, il peut y avoir une interaction négative avec les divers oiseaux d’eau locaux. Toutefois, l’impact est minimisé par la propension de l’espèce à choisir des sites de nidification peu attractifs pour les espèces indigènes : bassins de récupération des eaux, petits étangs de pêche privés et autres sites artificiels.
En hiver, l’ouette adopte en grande partie le même rythme que les oies grises : elle passe la nuit sur l’eau et se nourrit dans les champs en journée, particulièrement dans le cas des grands groupes. Il n’est toutefois pas exceptionnel d’en voir toute la journée sur l’eau, surtout le long du Rhin.
En vue de maîtriser le dévelopement de l’espèce, les arrêtés du 22 septembre 2010 (68) et du 24 mai 2011 (67) autorisent désormais le tir de l’espèce dans les deux départements alsaciens (toute l’année, et uniquement par des agents assermentés).
[*] : BURGLIN, E. (1983) – Une observation rare. Lien Ornithologique d’Alsace, 37 : 12.