Présentation de l’espèce
La chevêche d’Athéna (ou chouette chevêche) est un petit rapace nocturne qui réside toute l’année en Alsace. Parmi les rapaces nocturnes, elle est l'un des plus petits et des plus diurnes. Elle se reconnaît à sa tête ronde et large, à ses yeux jaunes et à son dos brun tacheté de blanc. Originaire du bassin méditerranéen, elle vit en dessous de 600 m d’altitude, là où les hivers sont doux et peu enneigés. Elle occupe les paysages ouverts, avec une prédilection pour les campagnes cultivées parsemées de vieux arbres, de prairies, de vergers d'arbres à hautes tiges ou de saules têtards. Ces biotopes lui offrent à la fois des terrains de chasse et des cavités pour nicher et se cacher durant la journée. Elle niche aussi volontiers dans les anciens bâtiments.
La chevêche est essentiellement active au crépuscule et la nuit. Elle se nourrit de gros insectes, de petits mammifères, ainsi que de vers de terre. Elle chasse à l'affût depuis un arbre ou un poteau, mais également en se déplaçant au sol. C'est pourquoi il est important que la végétation herbacée ne soit pas trop haute, ni trop dense
Statut juridique et liste rouge
Au même titre que tous les rapaces, la chevêche est intégralement protégée en France. Elle est en outre inscrite sur la Liste Rouge des espèces menacées en Alsace, avec la mention « En déclin ». Elle est tout particulièrement menacée dans nos régions en raison de la disparition progressive de son biotope. En effet, l’urbanisation des espaces périurbains au détriment des ceintures de vergers et l’intensification de l’agriculture ont entraîné la diminution des effectifs de nombreuses espèces dont la chouette chevêche et la quasi disparition des plus sensibles comme la pie-grièche à tête rousse et la huppe fasciée.
Population
Jusque dans les années 1960, la chouette chevêche était une espèce répandue dans toute l’Europe centrale, méridionale et orientale. Depuis lors, ses effectifs montrent un net recul dans la majeure partie du continent. En Alsace, entre les années 1960 et 1980, la régression a atteint 50% dans certains secteurs jusque là favorables. Il ne subsistait plus qu'une quarantaine de couples dans l'ensemble du Haut-Rhin dans les années 1980 (MAURER A., Campagne de prospection Chouette chevêche. Lien Ornithologique d'Alsace n°49, 1988. pp. 3-5.) et 5 ou 6 sur le piémont des Vosges du Nord.
Etudes, protection et effectifs actuels
Dans le Haut-Rhin
Grâce aux actions de sauvegarde mises en œuvre à partir des années 1990, la situation a pu être améliorée. Ainsi la population haut-rhinoise était estimée à 60 à 140 couples pour la période 1994-1995 (SANE R, La Chouette chevêche dans le Haut-Rhin – Résultat de deux années de prospection, Le Cigogneau n°54, 1996. pp. 17-26.).
Un ambitieux projet INTERREG, initié en janvier 2005 et financé à 50% par l’Union Européenne, est venu compléter le programme initial de préservation de la chouette chevêche et de son habitat mis en place en 1999. Il s’agit du programme « Préservation des vergers et de la biodiversité associée ». Achevé en juin 2007, il est relayé par le programme « Corridors écologiques et Micro-habitats ».
Dans le cadre des activités du Groupe chevêche 68 de la LPO Alsace, une étude a révélé, en 2010, la présence de 48 couples et 27 individus isolés sur les quelques 500 nichoirs et cavités naturelles suivis annuellement. Ils ont élevé 150 jeunes, dont 112 ont pu être bagués, ainsi que 11 adultes. 13 adultes bagués les années précédentes ont été contrôlés. Un programme de suivi par baguage se poursuit depuis 2006 sur les thèmes de survie, reproduction et dispersion des jeunes. Il permet de mieux comprendre l’évolution locale de l’espèce et d’affiner ainsi les mesures de sauvegarde à mettre en œuvre.
Évolution du nombre de couples suivis dans le Haut-Rhin. Source: Bertrand SCAAR, LPO-Alsace. A noter : la relative stabilité du nombre de couples en cavité naturelle comparativement à la progression des nichées sécurisées en nichoir. |
D’autres chevêchologues alsaciens ont également été mis à contribution pour l'Atlas des oiseaux nicheurs d'Alsace, dont la période 2006-2010 a été définie pour sa réalisation. Ainsi, 148 communes du Haut-Rhin ont fait l'objet de prospections, permettant de mettre au jour 86 territoires occupés par la chevêche. Ceci nous autorise à estimer sa population à un peu plus d'une centaine de territoires occupés dans le Haut-Rhin (estimation 110 – 150).
Dans le Bas-Rhin
Dans le département du Bas-Rhin, une enquête intensive a eu lieu en 2009. Ses objectifs étaient de préciser le statut de l’espèce dans le département et de compléter les données Atlas pour la chevêche ; parallèlement, elle a aussi permis de compléter les données Atlas pour les autres rapaces nocturnes.
Cette enquête a réuni 20 participants qui ont recensé 182 communes, sur 760 points de repasse. 1,5 passages ont été réalisés en moyenne sur chaque point, soit près de 1200 séances de repasse. Ceci a permis de recenser 99 territoires occupés par l'espèce en 2009. Cumulés aux données issues de l'Atlas des oiseaux nicheurs d'Alsace, 154 territoires nous sont, à ce jour, connus dans le Bas-Rhin concernant la période 2006-2010.
Depuis fin 2011 et pour une durée de 3 ans, la LPO Alsace est partenaire de l’opération "Vergers Solidaires» lancée par les communautés de communes du Rhin (Rhinau) et de Benfeld et environs. Elle participe au volet sensibilisation de l'opération, et assure le volet biodiversité en suivant la population de chevêches sur le territoire des deux communautés de communes ainsi que la pose d'une quarantaine de nichoirs pour palier les manques de cavités naturelles. Le recensement mené en 2012 a permis de comptabiliser une vingtaine de territoires occupés par la chevêche sur les deux ComCom. Un "groupe chevêche 67" a été mis en place pour la prise en charge de ces actions.